S’il est vrai que j’aime souvent procéder par séries, je suis aussi attentif à ne pas tomber dans un système, dans une formule, dans la répétition, sans doute pour me garder de l’ennui et épargner l’ennui de ceux qui suivent avec intérêt l’évolution de mon travail.
Ainsi, pour cette nouvelle exposition, j’ai délibérément cherché à dessiner un ensemble de 8 pièces toutes différentes les unes des autres...
S’il est vrai que j’aime souvent procéder par séries, je suis aussi attentif à ne pas tomber dans un système, dans une formule, dans la répétition, sans doute pour me garder de l’ennui et épargner l’ennui de ceux qui suivent avec intérêt l’évolution de mon travail.
Ainsi, pour cette nouvelle exposition, j’ai délibérément cherché à dessiner un ensemble de 8 pièces toutes différentes les unes des autres.
En fait, plus qu’un ensemble d’objets, j’ai le sentiment d’avoir d’avantage dessiné un ensemble de choses.
Si je ne cherche pas précisément à situer la distinction entre ce qui définit un objet et ce qui définit une chose, cela me convient de penser que les objets répondent à des fonctions, alors que les choses proposent des usages, que les fonctions sont à utiliser, alors que les usages sont à imaginer, que les objets ont une définition précise, tandis que la définition des choses, elle, reste toujours plus ou moins vague, floue, et toujours dépendante de l’appréciation de celui ou celle qui s’y confronte.
On peut considérer les choses que j’ai dessinées pour cette exposition comme des matérialisations de pensées, des objets de méditation, comme des suggestions, des objets disponibles à l’interprétation. On peut considérer ces choses comme des objets littéraux, des expressions concises de formes tridimensionnelles, comme des présences à la fois austères et sensuelles, des présences intenses et stimulantes. Ou considérer ces choses, comme de beaux objets, des objets d’une beauté étincelante, d’une beauté transcendante.
Dans telle chose, c’est la surface extrêmement brillante et le lustre du matériau qui absorbe notre attention, stimule notre perception et nous invite au toucher. Dans telle autre, c’est l’agencement répétitif du matériau, des plaques d’aluminium laquées, qui créé une vibration cinétique et nous incite au déplacement. Dans telle autre, c’est le vide crée par le dessin de sa base, espace laissé vacant, sans affectation précise, qui permet à un volume compact et coloré de léviter. Dans telle autre, c’est le dimensionnement d’une parabole murale, qui éclairé, donne un contour, une forme, une teinte, une profondeur à la lumière. Dans telle autre, c’est la forme en suspension qui intrigue quant à sa stabilité, quant à sa matérialité, quant à son usage. Dans telle autre, c’est la présence visible du mode d’assemblage, les soudures qui ont permis la construction du volume, mémoire d’une action passée, qui donne le sentiment d’être en présence d’un objet peut être encore inachevé. Dans telle autre encore, c’est l’action d’un bras articulé et désaxé qui permet de moduler et d’entrer dans un jeu d’ombre et de lumière, par un geste d’une extrême simplicité, sans le recours à une technologie abstraite, sophistiquée.
Plus que jamais, j’ai le sentiment d’être pris dans un mouvement qui se trouve et se prouve en avançant, un mouvement ou le dessin d’une chose est suspendu au dessin de la suivante, où il m’est de plus en plus difficile, d’exprimer le pourquoi, mais seulement le comment, de plus en plus difficile de comprendre comment ces choses peuvent prendre place, s’inscrire, dans la complexité et le panorama de notre paysage contemporain.
Plus que jamais, à la question de pourquoi je dessine, je ne peux répondre qu’en dessinant, je ne peux répondre qu’en assouvissant, même provisoirement, mon irrépressible envie de dessiner des choses. Et la galerie Kreo m’offre une nouvelle fois la parfaite boîte de résonance, pour la concrétisation, la matérialisation, l’exposition de ces différentes choses.
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Pierre Charpin, novembre 2008.